L’Arche

A relire les premiers billets de ce jeune blog, je me rends compte qu’il abrite plus de réflexions personnelles que de notes de recherches pour le moment ! 😉 Alors corrigeons cela, et pour commencer, voilà un sujet qui m’intéresse particulièrement en ce moment : la conception de l’Arche en tant qu’objet.

J’ai encore relu le passage de l’Exode sur la construction de l’Arche ; il doit y avoir des codes, un cryptage, je ne sais pas quoi exactement, pour que les proportions soient aussi précises. Peut-être un rapport de nombres ?…

1 Yahvé parla à Moïse et lui dit : « […]  10Tu feras en bois d’acacia une arche longue de deux coudées et demie, large d’une coudée et demie et haute d’une coudée et demie. 11 Tu la plaqueras d’or pur, au-dedans et au-dehors, et tu feras sur elle une moulure d’or, tout autour. 12 Tu fondras pour elle quatre anneaux d’or, et tu les mettras à ses quatre pieds : deux anneaux d’un côté et deux anneaux de l’autre. 13 Tu feras aussi des barres en bois d’acacia; tu les plaqueras d’or, 14 et tu engageras dans les anneaux fixés sur les côtés de l’arche les barres qui serviront à la porter. 15 Les barres resteront dans les anneaux de l’arche et n’en seront pas ôtées. 16 Tu mettras dans l’arche le Témoignage que je te donnerai.
17 Tu feras aussi un propitiatoire d’or pur, de deux coudées et demi de large. 18 Tu feras deux chérubins d’or repoussé, tu les feras aux deus extrémités du propitiatoire. 19 Fais l’un des chérubins à une extrémité et l’autre chérubin à l’autre extrémité : tu feras les chérubins faisant corps avec le propitiatoire, à ses deux extrémités. 20 Les chérubins auront les ailes déployés vers le haut et protégeront le propitiatoire de leurs ailes en se faisant face. Les faces des chérubins seront tournées vers le propitiatoire. 21 Tu mettras le propitiatoire sur le dessus de l’arche et tu mettras dans l’arche le Témoignage que je te donnerai. 22 C’est là que je te rencontrerai. C’est de sur le propitiatoire, d’entre les deux chérubins qui sont sur l’arche du Témoignage, que je te donnerai mes ordres pour les Israélites. […] » Exode 25-10-21

Extrait du Dictionnaire de la Bible (André-Marie Gérard, Laffont 1989).

Le mot « arche », tiré du latin arca, traduit le mot hébreu arôn : « le coffre ». Le coffre, meuble de grande tente, sert de siège aussi bien que de contenant. l’Arche sainte mentionnée plus de deux cents fois dans la Bible est l’un et l’autre : trône du Dieu d’Israël et châsse qui contient la preuve de l’Alliance qu’il a nouée avec son peuple.
Telle qu’elle se trouve décrite dans le livre de l’Exode (25-10-16), elle se présente comme un coffret rectangulaire en bois d’acacia, dont les dimensions sont données en coudées : 2,5 x 1,5 x 1,5 ; soit, d’après les différentes valeurs attribuées à la coudée en Égypte et dans les autres pays du Proche Orient : de 1,10 m à 1,30 m de longueur sur 0,70 m à 0,80 m de hauteur et de largeur environ.
Elle porte aux quatre angles des anneaux dans lesquels glisseront les barres de portage. Le tout est revêtu d’un placage d’or martelé. Le couvercle, lui, est fait d’or massif : c’est le « propitiatoire », traduction du mot hébreu qui signifie « faire expiation », par allusion au rite du « Jour des expiations » où le grand prêtre aspergeait du sang d’un bouc sacrifié pour les péchés du peuple ce couvercle de l’Arche. Le propitiatoire est lui-même surmonté de deux chérubins, d’or aussi, personnages ailés probablement inspirés des génies ou lions à face humaine des civilisations de Mésopotamie. Là est « le trône de Yahvé » : « entre les chérubins ». Là est le lieu « de la Rencontre » : de Yahvé avec Moïse, de Dieu avec son peuple.
Nul ne sait si une description aussi précise est bien celle du meuble liturgique primitif, ou si elle correspond mieux à ce qu’il devint au cours des âges. Nul non plus ne saurait faire l’exact inventaire de son contenu ni garantir que celui-ci demeura inchangé d’un bout à l’autre de son histoire. Les textes des différentes époques s’accordent cependant pour préciser que Moïse déposa dans l’Arche « le Témoignage » reçu de Yahvé au Sinaï ; le terme désigne sans équivoque les deux tables du Décalogue, celles « des dix Paroles » qui témoignent de l’Alliance. Selon certaines versions des Nombres, le bâton d’Aaron, après qu’il eut fleuri et mûri des fruits pour marquer par un signe éclatant le choix du frère de Moïse comme prêtre de Yahvé, aurait été lui aussi enfermé dans le précieux coffre. Mais il vaut mieux lire qu’il fut placé « devant lui », de même que le vase empli de manne dont parle l’auteur de l’épître aux Hébreux en se référant sans doute à un passage de l’Exode : « Aaron le déposa devant le Témoignage, afin qu’il soit gardé ». Une tradition rabbinique enfin voudrait que les morceaux des premières Tables du Décalogue, brisées par Moïse après l’épisode du veau d’or, aient été conservées auprès des nouvelles Tables, ainsi qu’un exemplaire du Pentateuque ou du moins du Deuteronome ; ce que ne signale aucun texte biblique.
Quelle qu’elle ait été, l’Arche d’alliance ou Arche du Témoignage demeure depuis l’Alliance au Sinaï le centre du culte mosaïque, attestant la présence de Yahvé parmi les siens. Elle sera vénérée dans le lieu le plus saint (le saint des Saints) du Sanctuaire du désert puis du Temple de Jérusalem, installée au cœur des campements, portée au milieu des colonnes en marche.
La progression est-elle hésitante ? Alors l’Arche du « seigneur de toute la terre » ouvre le passage : le Jourdain écarte ses eaux devant elle, ou plutôt devant celui qui par elle se manifeste, et tout le peuple franchit le fleuve à pied sec pour pénétrer dans le Terre promise. La ville forte de Jéricho, porte de Canaan, verra ses défenses crouler au son des trompettes qui accompagnent l’Arche sainte, au septième jour d’une procession solennelle d’Israël derrière le trône de son Dieu.
Une fois les tribus réparties, sinon solidement installées, en Canaan, l’arche demeure peut-être à Béthel, plus sûrement à Silo. D’abord, semble-t-il, sous la tente qui l’avait abritée durant la vie normale des Hébreux au désert. A l’époque des Juges dans un sanctuaire où l’on célèbre « d’année en année, la fête de Yahvé », et que le premier livre de Samuel nous montre desservi par la famille du prêtre Éli ; c’est là que le jeune Samuel lui-même sera consacré à Yahvé et recevra sa vocation prophétique.
C’est là aussi que les guerriers d’Israël, battus par les Philistins dans la région d’Apheq, au nord-est de Jaffa, viennent chercher « l’Arche de Yahvé pour qu’elle [les] sauve de la main de [leurs] ennemis ». Mais ce jour-là, Yahvé n’est pas avec son peuple parce que ce peuple a accepté la corruption, l’impiété et la débauche. Israël est vaincu, l’Arche enlevée par les païens philistins qui la tiennent pour un temps prisonnière à Archdod, dans le temple de Dagon leur idole. Or sa présence attire sur la statue du faux dieu et sur les habitants d’Achdod, puis de Gat et d’Eqrôn, de telles humiliations et calamités que les princes des Philistins décident de renvoyer l’Arche aux Israélites, accompagnée de présents en amende honorable, afin de se libérer de la malédiction du Dieu d’Israël.
Conduite sur un chariot par un attelage sans bouvier, elle est retrouvée par les lévites à Bet-Chèmech, sur la frontière nord du territoire de Juda, où certains habitants, qui probablement n’eurent pas vis-à-vis de l’arche sainte l’attitude convenable devant ce que Yahvé approche, sont frappés de mort. C’est finalement aux Gabaonites de Qiryat-Yéarim qu’elle est confiée. ils la garderont dans la maison d’Abinadab durant soixante-dix ans environ.
Le roi David viendra l’y chercher, après avoir réuni sous son autorité toute la nation d’Israël et doté celle-ci d’une capitale politique : Jérusalem, dont il veut faire aussi la capitale religieuse. Mais pendant le transport de l’Arche, Ouzza ou Uzza qui conduisait le chariot s’écroule et meurt pour avoir, en un geste trop familier, porté la main sur « le trône de la majesté divine ». Plein de crainte, David laisse alors l’arche  au  soin d’un bon yahviste : Obed-Édom, de Gat ou Guittaïm que l’on peut situer approximativement au nord de Jérusalem. Rassuré après trois mois par les bénédictions ainsi attirées sur la maison de ce fidèle, il vient l’y rechercher en grande solennité pour l’amener, cette fois avec toute la pompe et le respect souhaitables, dans sa royale cité. David danse lui-même dans le cortège, devant « le trône » de son Dieu, en simple costume liturgique, ce qui lui attire le mépris de sa trop orgueilleuse épouse Mikal ; il introduit l’arche dans une tente-sanctuaire préparée près de son palais, offre des sacrifices, appelle la bénédiction de Yahvé sur le peuple et distribue des dons. Les psalmistes chantent l’événement, entrée triomphale de Yahvé dans sa Demeure : « Qu’il entre le Roi de gloire ! […] Yahvé a fait le choix de Sion […] C’est ici mon repos à jamais. »
Au roi Salomon revient de remplacer le sanctuaire provisoire de David, sur « la montagne de Sion », par un somptueux temple en dur où l’Arche d’Alliance trouve sa place définitive dans la salle secrète appelée Saint des Saints ou Debir. Alors une nuée marque la divine présence : au jour de la Dédicace « la gloire de Yahvé remplit la maison de Dieu. »
Quatre siècles plus tard, les troupes de Nabuchodonosor brûlent cette Maison du Dieu d’Israël, et avec elle l’Arche disparaît à jamais… Bien qu’une tradition populaire, dont on trouve l’écho dans les Maccabées, veuille qu’avant le sac et l’incendie du Temple de Jérusalem (en 586 av. JC), le prophète Jérémie ait enlevée l’Arche en même temps que le mobilier sacré pour les cacher dans une grotte du mont Nébo « jusqu’à ce que Dieu ait rassemblé son peuple […] et se manifeste dans la nuée. »

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6 commentaires pour L’Arche

  1. Robert dit :

    Le rapport de proportion de la longueur à la largeur de l’arche représente le nombre d’or soit I,618. C’est un nombre que l’on trouve à la base de tous les calculs d’angle des cathédrales gothiques. L’Arche est donc bien plus qu’un objet religieux, c’est un catalogue de rapport géométriques. Pensez-y.

    • dupuis dit :

      Bonsoir…
      En « vadrouille » sur le Net…
      Je lis : « le rapport de proportion de la longueur à la largeur de l’arche représente le nombre d’or soit 1,618. etc. »
      Longueur de l’Arche : 2,5. Largeur de l’Arche : 1,5.
      2,5 / 1,5 = 1,66666…. et non pas 1,618. Rien à voir…

  2. La remarque sur l’inexactitude du rapport des proportions est judicieuse : le rapport de 2,5 à 1,5 est effectivement 1,66 et non 1,618…. Toutefois, si l’on reprend la lecture du texte de l’Exode, les proportions sont données pour le coffre en bois d’acacia, qui sera ensuite recouvert d’or. Ensuite seulement… En ce sens, le calcul critiqué, qui pose le rapport entre largeur et longueur de l’arche comme équivalent à 1,618, manque de précision.
    Les tenants de la thèse du respect du nombre d’or dans la construction de l’arche d’alliance pourront trouver intérêt au petit calcul suivant.
    L’épaisseur de la couverture d’or étant uniforme sur les quatre côtés de l’arche, elle modifie le rapport de proportion en faveur du côté le plus faible.
    La traduction mathématique pourrait être formulée ainsi :
    Si x est la valeur de la coudée ;
    Si y est l’épaisseur du revêtement doré.
    Si l’on émet l’hypothèse qu’au final ce rapport devait être de 1,618,

    Alors : 2,5x + 2y = 1,618(1,5x + 2y)

    On peut donc déterminer l’épaisseur du revêtement d’or (y) comme valant 0,0588 fois la coudée x.

    Si l’on prend arbitrairement la valeur de la coudée (non définie exactement) à 40 centimètres, dans l’hypothèse où devait être respecté le nombre d’or, le revêtement devait mesurer 2,35 centimètres.

    Tout ceci n’est bien sur intéressant que si l’on tient absolument à voir le nombre d’or dans cet objet.
    Merci en tout cas pour votre remarque qui m’a permis d’affiner et d’exposer l’un de mes axes de recherche. La détermination du « nombre d’or » découle avant tout à mon sens de l’observation humaine sur les rapports d‘angle assurant la solidité des édifices… mais ce nombre instille une réflexion mystique au cœur de l’architecture et de l’esthétique.
    Quelque part je suis heureux qu’il se pare encore de cette aura de mystère…

  3. Pierre Radas dit :

    Petits mais costauds, les Lévites !

    Je ne connais le récit de l’Exode que par la lecture du livre ARCA, mais j’ai des souvenirs
    de mes années de lycée et il y a un truc qui cloche vraiment ! L’arche, quand elle n’était
    pas transportée sur un chariot tiré par des vaches était sur les épaules de quatre( ??)
    Lévites.
    Si comme l’avance François Cazaud, l’épaisseur de la couche d’or était de 2,35
    centimètres, cela ferait pour la seule couverture des quatre cotés de l’arche 0,04 mètres
    cubes d’or. Vous imaginez le poids du machin ? Impossible de le transporter, même
    pour Chuck Norris
    Au fait, « lévitation », ca vient de « lévites » ???

  4. Chouchou dit :

    Ok, si c’est de l’or, ca pèserait au bas mot une tonne, mais si c’est du cuivre, le poids descendrait à 340 kilos, tout mouillé.

  5. Pierre Radas dit :

    Même avec du cuivre, le système du puits décrit dans ARCA ne pourrait pas fonctionner, et moi ce système je le trouve génial….

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